Jeudi 13 mars – Dimanche 30 mars
I CERCATORI DI LUCE
Giuliana Cuneaz
Chapelle de Beaurepaire
Horaires d’ouverture :
Du mardi au samedi de 13h à 19h
Le dimanche de 14h à 18h
En accès libre
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Jeudi 13 mars – Dimanche 30 mars
Horaires d’ouverture :
Du mardi au samedi de 13h à 19h
Le dimanche de 14h à 18h
En accès libre
I Cercatori di Luce (Les Chercheurs de Lumière), 2021, installation vidéo sur trois écrans, 35 min.
L’œuvre filmique de Giuliana Cunéaz, réalisée avec les technologies les plus sophistiquées, mêle cinéma, danse, théâtre et performance. Dans cette création d’une grande puissance évocatrice, des figures réelles évoluent dans des paysages 3D entièrement réinventés. Il en résulte une fresque magistrale sur le pouvoir régénérateur de la nature, à travers un lent parcours des ténèbres vers la lumière. Les Chercheurs de Lumière, porteur d’un message social et écologique, représente une recherche avant-gardiste dans le domaine de l’expérimentation technique. Parmi les protagonistes figure la grande actrice espagnole Ángela Molina, qui a collaboré avec des réalisateurs de renom tels que Luis Buñuel et Pedro Almodóvar. On note également la participation d’Aida Accolla, ancienne première ballerine de la Scala; Giulia Staccioli, chorégraphe, metteuse en scène et fondatrice de l’Académie Kataklò; la mannequin Aurora Talarico; et l’historien de l’art Bruno Corà. La musique est composée par Paolo Tofani.
Giuliana Cunéaz (Aoste, 1959) est une artiste spécialisée dans l’art des nouveaux médias. Diplômée de l’Académie des Beaux-Arts de Turin, elle utilise divers médias artistiques, allant de l’installation vidéo à la sculpture, en passant par la photographie, la peinture et les écrans peints (screen painting). Depuis le début des années 2000, elle réalise ses œuvres grâce à l’infographie. En 2004, elle figure parmi les premiers artistes à explorer la technologie 3D dans le cadre d’une recherche où la science et la technologie occupent une place centrale. Ses expérimentations combinent les éléments virtuels et matériels, donnant naissance à de nombreuses œuvres plastiques ancrées dans différents domaines d’investigation.
Ces dernières années, l’immersion a pris une importance prépondérante dans son travail, comme en témoigne son œuvre filmique sur trois écrans I Cercatori di Luce (Les Chercheurs de Lumière), réalisée en 2021. Depuis 2023, elle utilise l’intelligence artificielle avec des résultats particulièrement novateurs. Giuliana Cunéaz a présenté ses œuvres dans de nombreuses expositions collectives et personnelles en Italie et à l’étranger. En 2021, elle est entrée dans la Collection Quirinale Contemporaneo. Parmi les événements auxquels elle a participé figurent : la Biennale de São Paulo, Tina B. à Prague, Videoformes à Clermont-Ferrand, la Biennale de Séville Youniverse, Anteprima Torino dans le cadre de la Quadriennale de Rome, Project Daejeon, et la Biennale Light Art de Mantoue.
Propos recueillis par Fanny Bauguil (professeure relai à VIDEOFORMES) et Manon Derobert (chargée de communication pour VIDEOFORMES)
I Cercatori di Luce est une installation vidéo immersive projetée sur trois écrans, d’une durée d’environ 30 minutes. L’œuvre mêle cinéma, danse, théâtre et performance. Tous les personnages sont réels, tandis que les paysages sont virtuels, créés en 3D. Il est difficile de définir précisément ce que l’on voit ou entend, car le travail a été conçu comme une expérience individuelle et immersive. Il n’y a pas de véritable intrigue, mais plutôt un flux d’images traversé par des personnages qui accomplissent des actions concrètes. Il n’y a pas de dialogues, mais des sons, des musiques et des danses (les costumes ont été conçus et réalisés artisanalement par mes soins, en collaboration avec des étudiants en scénographie) qui donnent naissance à une ritualité collective, engageant également le spectateur sur le plan émotionnel. Le passage des ténèbres à la lumière est subtil, presque imperceptible, mais au fil des actions, tout tend à se transformer selon un processus évolutif menant vers une nouvelle dimension où solidarité et acceptation mutuelle prédominent. En somme, il ne reste qu’à regarder et écouter, en essayant de saisir les nombreux messages que l’œuvre contient. Le film est accompagné par les musiques de Paolo Tofani, ancien membre des Area (International POPular Group), l’un des groupes les plus expérimentaux des années 1970. De nombreux protagonistes participent à l’œuvre, notamment la grande actrice espagnole Angela Molina, qui a travaillé avec des réalisateurs tels que Luis Buñuel et Pedro Almodóvar. On retrouve également Aida Accolla, ancienne première danseuse du Teatro alla Scala de Milan, Giulia Staccioli, chorégraphe, metteuse en scène et fondatrice de l’Académie Kataklò de Milan, la mannequin Aurora Talarico, et l’historien de l’art Bruno Corà.
L’œuvre véhicule un message à caractère social. Chaque individu est absorbé dans la quête de cette lumière nécessaire pour régénérer la nature. On y trouve de nombreuses identités, qui semblent issues de cultures et d’époques différentes, mais toutes cohabitent en harmonie avec elles-mêmes et avec les autres. L’œuvre aborde principalement trois grandes thématiques : l’écologie, l’identité et le travail. Parmi les composantes de l’installation, on peut souligner la présence de grandes sculptures rotatives, symbolisant des étoiles en train d’accoucher, qui produisent de précieux diamants servant d’éléments régénérateurs. Un moulin est également présent, collectant l’eau et la transformant en énergie pour alimenter la planète. Lentement, les ténèbres s’estompent, et à la fin de la projection, une multitude d’enfants attendent de bâtir un Nouveau Monde.
L’installation vidéo a déjà été présentée au Palacinema de Locarno, au Meet Digital Culture Center de Milan et au Cyfest de Erevan, en Arménie. En revanche, c’est la première fois qu’elle est proposée en France. C’est une œuvre très élaborée, qui a nécessité trois années de travail. Le processus de création peut se décrire ainsi : tout a commencé par la réalisation du storyboard du film et de son scénario, suivie par la recherche d’un producteur et de partenaires techniques, ainsi que par la constitution de l’équipe. Une fois ces étapes franchies, j’ai entamé la phase exécutive, caractérisée avant tout par la modélisation en 3D de toutes les scènes. J’ai ensuite procédé à un casting pour sélectionner les personnages et leur attribuer les rôles. Parallèlement j’ai conçu les costumes et les accessoires en collaborant également à la chorégraphie et à la musique. Ce n’est qu’à ce stade que les tournages sur fond vert ont commencé, avec mon travail de mise en scène qui devait intégrer les interactions entre les personnages réels et la virtualité des paysages en 3D. Le tournage a duré une dizaine de jours, suivi d’un long travail de post-production. Celui-ci a compris plusieurs étapes complexes, notamment le pré-montage sur trois écrans, le compositing, le montage, l’optimisation et la correction des couleurs, les effets spéciaux et l’animation, l’édition audio et les titres de fin.
Je mène mes recherches en solitaire et, en général, j’évolue avec une grande liberté, y compris dans des domaines apparemment éloignés de l’art, tels que la science ou l’anthropologie. Je me considère comme une personne curieuse, avec une multitude d’intérêts. Enfant, je dessinais des costumes et je rêvais de faire du théâtre. En ce qui concerne l’art, j’aime les œuvres qui me transmettent des émotions et qui me poussent à réfléchir. Je privilégie celles qui me surprennent et qui empruntent des voies expérimentales. En revanche, je ne m’intéresse pas aux travaux purement pop ou uniquement centrés sur le contenu, ni aux “effets spéciaux” pouvant découler de l’usage du numérique. I Cercatori di Luce n’a pas de références esthétiques spécifiques, bien que je me sois inspirée des cultures du passé. J’ai souvent trouvé mon inspiration dans les atlas des cités perdues, ainsi que dans les images issues de la nanotechnologie. Mes passions pour la magie et le monde du fantastique sont également présentes, bien que j’aie toujours évité de me référer au surréalisme. De manière générale, il y a de nombreux artistes que j’apprécie. Parmi les maîtres du passé, je citerais Giorgio de Chirico, Paul Klee et Vincent van Gogh. J’ai d’ailleurs dédié à ce dernier, en 2005, l’une de mes premières vidéos en 3D, Les Mangeurs de pommes de terre (I Mangiatori di patate).
Parmi les artistes contemporains, je suis fascinée par le travail de William Kentridge et de Pierre Huyghe, mais je peux également être inspirée par des œuvres d’artistes plus jeunes. Lors de la dernière Biennale de Lyon, j’ai trouvé particulièrement intéressante la recherche de l’artiste slovaque Robert Gabris. L’art n’a pas d’âge : une belle œuvre est immortelle.
Pour réaliser I Cercatori di Luce, les difficultés ont été nombreuses. Je considère cette œuvre comme ma Chapelle Sixtine… La principale difficulté a certainement été d’obtenir les financements et de trouver des partenaires intéressés par sa réalisation. Heureusement, ce projet a rencontré une adhésion immédiate, et de nombreuses personnes m’ont soutenue.Le contact avec le CISA – Conservatoire International des Sciences Audiovisuelles de Locarno – a été crucial, car il m’a permis de réaliser les prises de vue. La recherche des acteurs a également été un processus complexe, mais j’ai réussi à impliquer Angela Molina, qui incarne de manière emblématique le personnage central du film. Les collaborations avec la NABA (Nouvelle Académie des Beaux-Arts) de Milan, l’Académie Kataklò de Milan dirigée par Giulia Staccioli, ainsi que la rencontre avec la grande danseuse Aida Accolla, ont également été déterminantes. Cette dernière, après plus de trente ans, est revenue danser spécialement pour moi. Sur le plan technique, la réalisation a été un véritable défi. Plus largement, je peux dire que mon travail a toujours représenté une forme de défi, car je n’ai jamais voulu me conformer ni répéter des schémas déjà assimilés. Je ne me suis jamais imposé de limites, ce qui m’a amenée à créer des œuvres apparemment très différentes les unes des autres. Cela n’a pas toujours permis une reconnaissance immédiate de mon style. Je n’ai jamais cherché à plaire aux autres ni pensé au marché. Cette indépendance m’a parfois causé des difficultés dans la réalisation de mes projets. Cependant, je suis fière d’avoir suivi cette voie sans compromis. Pour entreprendre un tel travail, il faut une immense passion, beaucoup de ténacité, de constance et de confiance en son propre parcours. Il est nécessaire de faire face à la solitude et au scepticisme de nombreux interlocuteurs, et il ne faut jamais céder aux tentations liées à l’argent ou aux succès faciles.
Vous pouvez consulter mon site web www.giulianacuneaz.com et suivre mon activité sur Instagram via le compte giuliana_cuneaz.
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J’ai commencé à l’adolescence et je n’ai jamais arrêté depuis. Mes premiers travaux étaient des installations environnementales. Par la suite, j’ai réalisé de nombreuses œuvres vidéo, tout en mêlant fréquemment ce langage avec d’autres techniques d’installation. En 2003, j’ai commencé à travailler avec le 3D, et depuis 2023, j’utilise l’intelligence artificielle. J’ai toujours aimé créer des dialogues entre le monde matériel et le monde virtuel, en établissant des relations entre eux pour générer de nouvelles synergies, parfois imprévisibles, même pour moi. Bien que ma recherche soit très cohérente, les thèmes que j’aborde varient. À certaines périodes, ce sont des sujets liés à la science qui dominent, tandis qu’à d’autres, ce sont ceux connectés au monde magique et imaginaire. Pour moi, il n’y a aucune contradiction : les deux renferment des secrets et de grands mystères… Je pourrais me définir comme une artiste et une interprète du mystère. Concernant votre question sur le fait de vivre de mon activité créative, je peux vous dire que j’en vis depuis 2002, bien que cela n’ait pas été sans difficultés. Avant cela, je complétais mes recherches par d’autres activités. J’ai été enseignante et j’ai collaboré avec le Musée Archéologique Régional d’Aoste.